C’est la star du carnaval ! Les groupes à peaux se colorent de roucou en mémoire des Indiens caraïbes. Une graine aux multiples vertus !
Originaire des Antilles et d’Amérique du Sud, le roucou (Bixa orellana) appartient à la famille des Bixacées dont fait partie la rose du Pérou (Cochlospermum vitifolium) aux fleurs jaune vif, très peu répandue dans notre habitat. Le nom de genre Bixa provient de bija, son nom vernaculaire espagnol, et l’épithète « orellana » honore le navigateur et explorateur espagnol Francisco de Orellana qui a nommé le fleuve Amazone. C’est une petite famille qui ne compte qu’une vingtaine d’espèces réparties en trois genres et localisées dans la zone tropicale.
Ses utilisations
Art floral
Le roucouyer, appelé « arbre à rouge à lèvres », était très connu aux Antilles pour l’utilisation de ses graines dans la cuisine locale, mais de nos jours, il est surtout mis en valeur dans l’art floral. La beauté de ses fleurs rosacées ou blanches surmontées de ses nombreuses étamines saillantes, ou encore de ses fruits (capsules) rouges, rarement blancs, met en valeur les compositions florales.
Peau
Une autre utilisation était déjà connue aux États-Unis par les Amérindiens qui, pour protéger leur peau et leurs cheveux du soleil, des insectes et des mauvais esprits, se peignaient à l’aide du colorant rouge du roucou mélangé à de l’huile de ricin. Ils furent alors appelés les « Peaux-rouges ».
Colorant
La présence de bixine et de norbixine dans ses graines en fait un super-colorant largement utilisé dans le domaine alimentaire où il est connu sous le code européen de E160b. Dans de nombreuses préparations, il remplace le paprika sans sa note légèrement piquante. Les propriétés tinctoriales du roucou sont aussi utilisées pour donner une jolie couleur orangée à la laine et à la soie.
Cuisine
Sur le plan culinaire, nos grands-mères appréciaient le beurre rouge, un condiment à base de beurre et de pulpe de graines de roucou. Elles les faisaient également macérer dans de l’huile afin d’obtenir une huile rouge qui colorait les plats. Aujourd’hui, les cuisiniers l’incorporent dans le fameux court-bouillon de poissons.
Il faut être expert pour percevoir dans le roucou, lorsqu’il est ajouté en grande quantité, une note poivrée relevée d’une pointe de noix de muscade qui vire à l’amertume. De saveur plutôt neutre, le roucou, par sa couleur vive aiguise l’appétit et dynamise les mets. Dans l’industrie alimentaire, on retrouve sa présence dans la croûte de certains fromages tel le Livarot qui, durant sa maturation, est lavé avec de l’eau colorée au roucou. Le Cheddar, la Mimolette, le Reblochon ou encore l’Edam ont leurs pâtes colorées aux graines de roucou.
La liste de son usage culinaire est très longue, car son coût moins élevé que le safran en fait un additif jaune-orangé de choix qui est parfois ajouté dans les charcuteries, le beurre, les sauces, les condiments, les confitures, les bonbons, le chocolat…
Cosmétique
La cosmétique a trouvé dans le roucou un additif non toxique qu’elle intègre dans les rouges à lèvres, les huiles et crèmes solaires, les produits de maquillage.
Ses propriétés
Le roucou contient de nombreux principes actifs dont le bêta-carotène présent dans la cire de ses graines. 100 fois plus riche en bêta-carotène que la carotte, et grâce à ses anti-oxydants, il agit en tant que protecteur des ultra-violets en stimulant la production de mélanine sous la peau. C’est un véritable préparateur de la peau au bronzage. De nombreux oligo-éléments sont présents dans le roucou : calcium, soufre, magnésium, sélénium, zinc, cuivre, manganèse. Indispensables au bon fonctionnement de l’organisme, certains renforcent nos défenses immunitaires, tandis que d’autres participent à la vie de nos cellules.
Dans la médecine traditionnelle péruvienne, on lui attribue des propriétés anti-inflammatoire, antifongique (contre les champignons), antimicrobienne, antivenin, antiseptique, émollientes (en soin de la peau, il relâche les tissus) et anti-acnéique. Il semblerait que la décoction de feuilles soit utilisée comme antivomitif. Les feuilles et les racines seraient utilisées en infusion contre les maux de tête et l’infusion des graines pour combattre la fièvre !
Mise en garde
Toute utilisation de la plante à visée médicinale doit faire l’objet d’un échange avec votre médecin ou votre pharmacien.
Je fais mon huile de roucou !
Il suffit de verser 10 càs rases de graines de roucou dans 1 litre d’huile végétale préalablement tiédie. Laisser refroidir et verser dans une bouteille en verre. Agiter et mettre à reposer durant 1 semaine. Vous obtiendrez ainsi une huile colorée que vous pourrez utiliser dans vos plats en sauce. La jolie couleur jaune-orangé obtenue séduira vos invités et apportera une touche ensoleillée à vos mets.
Par Hilaire Annonay, botaniste