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Santé : ils consultent un gadèdzafè !

Santé : ils consultent un gadèdzafè !
Shutterstock

Qu’il soit nommé gadèdzafè ou séancier, tout le monde connaît leur existence ! Aux Antilles-Guyane, ils sont invoqués pour toutes sortes de maux de cœur, de corps et d’esprit…

« Nous, soignants, ne sommes pas toujours les premiers interlocuteurs », reconnaît le Dr Foucher, psychiatre au Centre hospitalier Maurice Despinoy à Fort-de-France. « Les patients ne s’en vantent pas, mais souvent, ils vont voir des guérisseurs avant de voir un médecin. » Si le recours à ces pratiques reste tabou, il est fréquent.

Retards de prise en charge

Gadèdzafè en Guadeloupe, kenbwaseur en Martinique, gado en Guyane, les séanciers occupent une place importante dans l’approche du soin mental ou physique aux Antilles-Guyane. Cette pratique reste pourtant confidentielle, taboue parfois, et peut s’avérer dangereuse. « Le fait d’aller voir un gadèdzafè avant un médecin retarde la prise en charge médicale », regrette le Dr Foucher. « La base, c’est de consulter un médecin. Les gadèdzafè, eux, soignent les pathologies qui ont juste besoin d’un effet placebo. Et il faut faire attention, il y a souvent des cas d’abus financiers et sexuels », ajoute le psychiatre. En 2011, un gadèdzafè comparaissait devant la cour d’assises de Guadeloupe pour viols. En 2013, c’est un sorcier qui est séquestré par deux jeunes, persuadés de subir son mauvais sort.

Monde secret

Gadèdzafè en Guadeloupe, kenbwaseur en Martinique, gado en Guyane

Bernard côtoie ces milieux depuis sa majorité. « Il y a de tout, des charlatans, qui ne pensent qu’à l’argent et des séanciers investis qui respectent la « déontologie » du gadèd. C’est-à-dire des guérisseurs qui savent renvoyer vers des médecins lorsque le trouble est « mécanique ». Dès lors qu’il n’y a pas de problème d’orgueil, ils savent conseiller. » Selon ce passionné de sorcellerie, ils seraient une vingtaine en Guadeloupe, « un monde secret, gouverné par des initiés, des Haïtiens, des Africains, des Guadeloupéens… », ajoute-t-il.

Regarde les affaires

Maître Djas, un des rares ayant accepté de répondre à nos questions, pratique surtout la voyance, et donne des prières pour répondre aux problèmes de santé des gens. « Je reçois parfois des personnes pour qui la médecine n’a rien donné. Je suis croyant, vous savez, et nos ancêtres avant l’arrivée de la médecine, faisaient comment ? Moi, je prie. C’est un héritage familial que j’ai reçu, ce n’est pas quelque chose que l’on apprend. » Un gadèdzafè, c’est quelqu’un qui regarde les affaires. « C’est à double sens, il regarde, mais il garde, dans le sens de préserver. Un séancier donne des séances, comme le psychanalyste d’ailleurs », sourit Dany Joseph Ducosson, pédopsychiatre à la retraite à Gourbeyre.

Corps et esprit

Corps et esprit Gadèdzafè

« Et si les gadèdzafè font un travail d’écoute, ils n’ont pas la même approche qu’un psychanalyste. C’est autre chose encore. Eux cherchent un coupable, pas moi. Lorsque les gens viennent voir un médecin, ils parlent de l’absence, du manque, d’un problème, et ils attendent. Le médecin questionne, échange et donne son ordonnance. Le gadèdzafè prescrit, mais parle peu. Il cherche peu, il a un système d’explications très rapide. Le mal et le persécuteur sont identifiés, il donne alors des méthodes pour s’en préserver. À chaque fois, cela a un lien avec le corps et l’esprit. Ces deux éléments sont très liés en Guadeloupe. Beaucoup portent des petits sachets autour du cou, en contact avec le corps, pour soulager l’esprit… Il y a des médailles aussi, les herbes, les bains… », explique Dany Joseph Ducosson.

« Maladie à sorcier »

Pour elle, les guérisseurs ont leur place dans la société. Il faut être simplement conscient des limites et des risques. « Les médecins généralistes ont une vision simpliste du rapport corps/esprit, et ne prennent pas toujours le temps d’écouter. Ils regardent les symptômes, certains ne touchent même pas le corps. Là-dessus, les gadèdzafè peuvent faire du bon boulot. L’inconvénient, c’est qu’ils enferment le patient dans une situation de persécution et la victimisation n’apporte rien. Et je ne parle que des gadèdzafè sérieux. Les sérieux disent : « Ça ce n’est pas une maladie à sorcier, mais une maladie à médecin. » Les « sérieux » renvoient le malade vers un praticien. » Et d’ajouter qu’il faut rester méfiant. « Il n’y a pas de conseil de l’ordre des gadèdzafè, comme il y en a pour les psychanalystes ! »

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